mercredi 31 juillet 2019

L'incendie de Bel Air

Les chroniques de l’ARF

L’ARF, Recherches, Sauvegarde, Patrimoine ferriérois, propose régulièrement aux lecteurs du Ferriérois des articles sur les personnages qui ont marqué la vie ferriéroise et parfois, plus souvent qu’on ne le pense, la vie nationale, ainsi que sur des évènements heureux, dramatiques ou insolites qui ont jalonné la vie des habitants. Les lecteurs sont invités à réagir et à faire part des informations ou de la documentation dont ils disposeraient, précisant ou complétant le contenu de la chronique.



Pour cette chronique n°2, nous sommes le 3 juillet 1827.

Vers 2 heures du matin, les habitants de Ferrières sont réveillés par le tocsin. Pas vraiment réveillés car déjà depuis minuit le tonnerre assourdissant d’un épouvantable orage les tenait en éveil.

Mais laissons la parole au Maire de Ferrières.






Rapport à Monsieur le sous-Préfet de Montargis par le Maire de Ferrières sur l’incendie qui a eu lieu en cette commune dans la nuit du 2 au 3 juillet 1827 aux bergeries et vacheries de la ferme de Bel-Air appartenant à M. Audebert (1).

Monsieur le sous-Préfet,



Le trois juillet entre minuit et une heure du matin, un orage terrible éclata sur Ferrières, le temps était en feu. Quoiqu’à ce moment les coups de Tonnerre qui se succédaient dans presque toutes les directions fussent éloignés, ils se multiplièrent avec rapidité en se rapprochant avec une telle violence que en une heure il tomba dans plusieurs endroits, notamment sur une
portion de la ferme de Bel Air et aux lieux de la Couture(2)  et de la Côte de l’étang(3); il ne se produisit aucun ravage dans les deux premiers endroits mais il n’en fut malheureusement pas de même à la ferme de Bel Air où il mit le feu. Ce ne fut qu’à deux heures que je fus informé de ce malheur, alors je fis sonner de suite le tocsin, prévenir la Gendarmerie que j’appelai et je me transportai le plus promptement possible sur les lieux avec la majeure partie de la population de ferrières; nous y arrivâmes à environ 2 heures un quart; quelques individus parvenus avant moi, du nombre desquels était Jean-Baptiste Le Loup, cultivateur, …Picault, garde forestier (ces deux derniers proches voisins) et François Porier, maître maçon avec tous ses ouvriers nous précédèrent quelques instants, déjà ils avaient fait tomber avec succès plusieurs pièces de bois de la toiture du bâtiment qui brulait. Ils s’étaient occupés d’employer tous les moyens possibles pour empêcher la communication du feu. Lorsque nous fûmes réunis et en nombre suffisant pour pouvoir établir une chaîne assez longue pour nous procurer de l’eau qui était éloignée du foyer de l’incendie, nous parvînmes à force de travail et de bras à préserver les bâtiments voisins et à concentrer le feu dans la section où le tonnerre était tombé que nous ne pouvions penser à conserver. Le feu concentré entre 3 et 4 heures du matin (heure à laquelle j’ai pu vous écrire une note), nous sommes parvenus à l’éteindre entièrement en une heure et demi ou deux heures de travail, tant au moyen de deux chaines établies aux deux seuls puits(4)  que nous possédions et qui ne fournissaient de l’eau que bien lentement, qu’au moyen de tous les chevaux et voitures de la ville que j’avais mis en réquisition pour charrier de l’eau où il était possible de puiser, tellement qu’à cinq heures et demi le feu était totalement éteint.
Les moutons (à l’exception de neuf) qui se trouvaient dans le bâtiment incendié ont été sauvés par le courage de la nommée Marie Duthey, bergère de M. Audebert qui est entrée seule d’après la déclaration de ce dernier sous le chaffaud en feu et qui sans aide est parvenue à en sauver à travers les flammes 210, tant moutons que brebis. Les vaches qui étaient dans le même bâtiment au nombre de sept ont été sauvées aussi à travers le feu par le courage de M. Audebert qui n’a eu d’autre aide que celle de la fille Blaise Hurey sa domestique.
M. Verot(5)  mon adjoint m’a secondé de tout son pouvoir dans les divers travaux que nous avons fait exécuter de concert avec les principaux ouvriers de la ville, et je ne saurai vous dire quels sont ceux de mes habitants qui méritent le plus d’éloge dans cette circonstance, car tous (à l’exception de 2 ou 3 que je citerai à la police comme se trouvant dans le cas de subir les peines prévues par l’art. 475 du code pénal) ont donné les plus grandes preuves de zèle et de dévouement. Nous avons à regretter qu’il y en ait de blessés, entre autre le nommé Pierre Lagarde, père de famille ouvrier maçon de Ladapaire dépt de la Creuse, présentement employé chez M. Porier que nous avons failli perdre ; placé sur le haut d’un mur pour faire tomber des pièces enflammées de la partie supérieure de la charpente, il est tombé sur un chaffaud embrasé duquel il n’est remonté que par miracle, et quoiqu‘ayant eu les pieds, les jambes et les mains brulées, il s’est replacé sur le mur où il était avant sa chute et n’a quitté son poste que lorsque son travail est devenu inutile. Le sieur Pautré, maître charpentier à Ferrières a failli subir le même sort, heureusement que comme le premier il en a été quitte pour quelques brulures aux mains et aux jambes. Les sieurs Porier, maçon, Deloince frères, charpentiers, Me Barthélémy et autres ont eu aussi des contusions et brulures plus ou moins fortes. Je crois devoir, Monsieur le sous-Préfet, vous prier de recommander particulièrement à la bienveillance de Monsieur le Préfet deux individus ci-dessus nommés Pautré et Pierre Delagarde qui se sont exposés aux plus grands dangers, je pense qu’ils en sont dignes et qu’une Récompense peut leur être accordée ainsi qu’à la bergère Marie Duthey tant par le danger extrême qu’ils ont couru que par les brulures et blessures qu’ils ont eues.
Je dois vous dire aussi que je ne puis trop me louer du Brigadier de la Gendarmerie de Fontenay et de ses Gendarmes qui ont fait tout ce qu’ils ont pu pour me seconder.

Je saisis cette circonstance, Monsieur le sous-Préfet pour vous renouveler les prières que je vous ai déjà adressées pour que vous veuillez bien prendre en Considération les diverses délibérations qui ont été prises par la Commune de ferrières relativement à l’acquisition d’une pompe à incendie; si aujourd’hui nous eussions été assez heureux pour en avoir une, nos secours auraient été bien plus prompts et bien plus efficaces car si la pluie qui tombait avec force n’eut pas contribué à éteindre le feu, nous n’aurions peut-être jamais pu empêcher l’embrasement total de la ferme qui est d’une grande importance, pourquoi je vous supplie de faire droit à nos demandes.

Agréez je vous prie l’hommage de la haute considération avec laquelle j’ai l’honneur d’être…

Ferrières le 3 juillet 1827  
 Signé Fosse (6)







Deux ans plus tard, Tranquille Désiré Fosse laissait sa place de maire à François Maulmont. Nous ne savons pas ce qu’il advint des demandes de récompense. Mais L’autorisation à Ferrières de se doter d’une pompe à incendie arriva très vite…



Pompe à incendie
 









Sépulture de Tranquille Désiré Fosse dans le carré funéraire familial au vieux cimetière de Ferrières.
 










                                                                                                       Françoise souchet
                                                                                                       François Petit

Sources : Archives municipales de Ferrières-en-Gâtinais, registre des délibérations.

1-Nicolas Audebert, héritier des receveurs du domaine de Courvilaine, dont les conditions dans lesquelles il a pris possession du domaine de Bel-Air en 1793 restent à éclaircir.
2-Aujourd'hui, place Gaston Lempereur.
3-Le flanc gauche du chemin du bas de l'étang, chemin qui longe la Cléry à partir de l'Espace Saerbeck.
4-Probablement celui de la ferme elle-même, et celui, beaucoup plus loin de la queue de l'étang.
5-Edmé Verot, notaire à Ferrières.
6-Tranquille Désiré Fosse, né le 26/9/1795(5 vendémiaire an 3) de parents aubergistes à Bonnebosq(Calvados), décédé à Ferrières le 15 janvier 1836, maire de Ferrières de 1821 à 1829.

Photos : ARF


ARF : patrimoineferrierois.com ; assrech.ferrieres45@yahoo.fr 

mardi 23 juillet 2019

Le capitulaire de Charlemagne

AU TEMPS DE CHARLEMAGNE


Capitulaire de Villis vel curtis imperialibus rédigé entre 792 et 800
Communiquée par le Muséum d’Orléans

Liste établie à partir des ouvrages :
- Les plantes du jardin médiéval, Michel Botineau, ed. Eveil Nature, 2001.
- Plantes et jardins du Moyen-Age, Michel Cambornac, Hartmann édition, 1998.


Potherbes (herbes cuites dans le pot)

Lactuca, la laitue
Eruca alba, la roquette
Nasturtium, le cresson alénois
Intuba, la chicorée
Sinapa, la moutarde
Beta, la bette ou betterave
Adripia, l’arroche
Blida, la blette ou arroche-fraise
Caulo, le chou
Malva, la mauve

Plantes maraîchères à racines

Silum, le chervis
Parduna, la bardane
Olisatrum, le maceron
Carvita, la carotte
Pastenaca, le panais
Ravacaulus, le chou-rave et le navet
Unio, l’oignon
Porrum, le poireau
Radix, le raifort
Ascalonica, l’échalote
Alium, l’ail
Radix, le radis

Légumes

Fenigrecum, le fenugrec
Fasiolus, la mougette
Cicer, le pois chiche
Faba, la fève
Pisus, le pois

Aromates et condiments

Cimimum, le cumin
Ros marinus, le romarin
Caraeium, le carvi
Anesum, l’anis
Ameum, le meum d’athamante
Sinape, la moutarde
Petroselinum, le persil
Apium, l’ache, céleri sauvage
Levisticum, la livèche
Anetum, l’aneth
Fenicolum, le fenouil
Satureia, la sarriette
Britla, la ciboulette
Cepa, la ciboule
Coriandrum, la coriandre
Cerfolium, le cerfeuil
Narsturtium, la grande passerage
Dragantea, l’estragon

Cucurbitacée ou « plantes maraîchères dites de fleurs et de tout ce qui s’y attache »

Cucumer, le concombre
Pepo, la citrouille
Cucurbita, la gourde ou calebasse
Coloquentida, la coloquinte

Herbes magiques, toxiques

Papaver, le pavot

Herbe des fièvres, des inflammations

Febrifuga, la petite camomille
Mismalva, la guimauve
Git, la nigelle,(patte d’araignée)

Plantes et boissons

Humulone, le houblon
Vitis, la vigne

Plantes panacées

Salviam, la sauge officinale
Sclareiam, la sauge sclarée
Nepta, la cataire
Sequilla, la scille
Solsequinum, le souci
Jovis barbum, la joubarbe
Vitonica, la bétoine
Lauros, le laurier

Maux de ventre

Costum, la balsamite, menthe coq
Abrotanum, l’aurone
Puledium, la menthe pouliot
Sisimbrium, la menthe aquatique
Menta, la menthe cultivée
Mentastrum, la menthe sauvage
Tanazita, la tanaisie

Plantes à purges
 Lacteridas, l’épurge
Vulgigina, l’asaret

Plantes de femmes
 Rutram, la rue
Savinam, la sabine (genevrier)
 Diptamnum, le dictame de Crète

Fleurs du jardin
 Lilium, lis
Rosa, rose
Gladiolum, iris

Arbres du verger
 Pomarius, le pommier
Pirarius, le poirier
Prunarius, le prunier
Sorbarius, le sorbier
Mespilarius, le néflier
Castanearius, le châtaigner
Persicarius, le pêcher
Cotoniarius, le cognassier
Avellanarius, le noisetier
Amandelarius, l’amandier
Morarius, le mûrier noir
Ceresarius, le cerisier
Nucarius, le noyer

Plantes utilitaires

Linum, le lin
Cardo, la cardère à foulon
Warentia, la garance
Waisdo, le pastel ou la guède

lundi 15 juillet 2019

Se nourrir au Moyen Âge

Se nourrir au Moyen Âge



Le pain est à la base de l’alimentation. Le pain blanc est destiné aux classes les plus favorisées mais aussi aux chanoines et aux moines. Le four de Saint-Gall était réputé pour pouvoir contenir 1000 pains. Pour  beaucoup de paysans, des bouillies d’orge et d’avoine remplaçaient le pain. En cas de disette, le sarrasin et la farine de châtaignes étaient utilisés. Pour de rares desserts, étaient composés des crêpes, des tartes dites tartres, parfois des beignets ou des galettes.
Les gens riches mangeaient des produits de la chasse fortement épicés et accompagnés de condiments. Toutefois, il est possible de consommer de la viande fumée ou salée. Pour les jours maigres, sont servis des plats de poisson de mer (morue, hareng salé ou fumé) ou de rivière, d’étang, de vivier. Au moment des fêtes, les œufs, la volaille, sont présentés aux plus riches. A ce régime, ceux-ci prenaient la goutte. Les pauvres en étaient préservés. Si le pain manquait, ils devaient se contenter d’herbes,c’est-à-dire de légumes.
Les moines, grâce à leurs élevages pouvaient manger des produits laitiers, en particulier du fromage. fabriqué avec le lait de brebis ou de chèvres.
Parmi les légumes, il convient de distinguer ceux qui poussent dans les champs: fèves, lentilles, pois, pois chiches et ceux qui poussent dans les potagers: poireaux, ails , laitues, oignons, carottes dont les tiges sont bouillies et les racines  cuites. dans la cendre de la cheminée.
Des textes ont permis de retrouver d’anciennes recettes .
Le liber de coquina, rédigé en latin a été écrit vers 1300. Il est divisé en plusieurs chapitres: légumes, légumineuses, viandes, desserts, poissons et entremets. Il consacre une place importante aux  légumes consommés dans les milieux modestes alors que les seigneurs mangent des entremets. On y relève des recettes de pois, pois chiches, fèves, lentilles, fenouil.
Le viandier écrit en1330 par Guillaume Tirel dit Taillevent  est l’ouvrage le plus connu du Moyen Âge. Il a été rédigé pour Charles V. Plusieurs versions ont été données. L’auteur suit l’ordre d’un repas médiéval: potages, rôtis,entremets. Le terme « viandier » est employé dans un sens large: vivenda signifie aliments en général.
Le mesnagier de Paris rédigé entre 1392 et1394, d’inspiration italienne, reprenant des façons de la cuisine romaine, est un ouvrage didactique destiné à une jeune épouse. La troisième partie est consacrée aux problèmes domestiques relatifs aux achats concernant la cuisine ainsi qu’aux recettes culinaires. Celles-ci sont au nombre de 400; certaines reprennent des descriptions prises dans des ouvrages antérieurs. Elles s’adressent notamment aux membres de la bourgeoisie.
 Dans l’ensemble, une cuisine un peu acide est préférée à base de vin, vinaigre, verjus.., oseille  L’utilisation de plantes  aromatiques la caractérise. Les paysans les connaissent; les moines les cultivent dans les jardins de leurs monastères. Agrémentée par celles-ci, des épices en relèvent encore le goût.
D’après le liber de coquina, le fenouil et l’aneth sont choisis en raison de leur goût assez particulier, fort prisé au Moyen Âge. L’aneth, dans certaines régions, s’appelle fenouil bâtard. Il a des vertus médicinales et stomachiques professées par les médecins de Salerne:  « l’aneth, qu’avec l’anis, il ne faut pas confondre, dissipe les vents, les humeurs; même il a la vertu de fondre un gros ventre et d’ éloigner les mauvaises humeurs ».La marjolaine et le romarin sont des plantes méditerranéennes Il existe deux sortes de marjolaine: officinale et origan. La première s’accorde avec le romarin; la seconde a un goût plus prononcé .
Le cumin est une ombellifère cultivée au Moyen Âge dans tous les jardins; les Romains l’utilisaient à la place  du poivre car les graines séchées ont une odeur forte. La sauge, elle est considérée comme un remède miracle; son nom est dérivé du latin  « salvare » signifiant sauver. Les médecins de l’école de Salerne énoncent ses vertus; elle permet de raffermir la main tremblante, de conforter les nerfs, d’arrêter la fièvre; bouillie avec du miel , elle aide les pneumatiques.
Exemples de recettes :
Les soupes "suppa" au Moyen Âge sont d’épaisses tranches de pain sur lesquelles on verse du bouillon. Le mot a ensuite pris le sens de potage. Elles sont à la base des repas des gens de la terre . Ceux qui vivent en plaine mangent plus souvent à leur faim  que ceux de la montagne mais ceux-ci ont une nourriture mieux équilibrée grâce aux produits laitiers et aux fruits sauvages.
Dans la cuisine médiévale, où souvent les mets sont bouillis ou trempés, il convient d’en relever le goût. Pour ce faire, une plante, le sénevé, facilement cultivé, donc peu cher est utilisée. Ce condiment porte le nom de moût ardent  car il pique les papilles. En effet, la moutarde est composée de graines de sénevé broyées avec du vinaigre ou du moût de raisin.
 Charlemagne recommande de cultiver celle-ci dans le capitulare de villis vel curtis imperii, aujourd’hui conservé à la bibliothèque de Wolfenbüttel en Suisse. Les plantes énumérées sont au nombre de 94. Toutes les plantes ont à la fois des qualités médicinales et culinaires. On reconnait à la moutarde des vertus thérapeutiques: antiseptique, apéritive. A cette époque, dans les villes, les enfants munis de pots vont l’acheter chez les marchands de sauce qui la confectionnent. Dans les campagnes, elle est réalisée à la maison.
Soupe à la moutarde : recette avec du pain; c’est un plat et non un bouillon.
Mettez l’eau additionnée de vin dans une casserole. Laissez bouillir et faites pocher les œufs. Retirez- les, égouttez et effrangez- les. Faites réduire le liquide de moitié. Ajoutez l’estragon, le persil, l’ail, le tout finement haché. Ajoutez la moutarde. Salez, poivrez. Remuez bien. Grillez les tranches de pain. Servez les œufs dans les assiettes chaudes, nappez les de sauce et  disposer les tranches de pain autour.
Pour 4 personnes: 4 œufs, 4 tranches de pain, 20 cl d’eau, 20 cl de vin rouge, 2 cuillerées à soupe de moutarde, 1 cuillerée à café  d’estragon haché, 1 de persil haché, 1gousse d’ail, sel et poivre selon le goût.
Brouet provençal. A l’origine,c’est une sorte de bouillon. Le terme est dérivé de  « breu » signifiant bouillon chez les Germains qui accordent dans leur nourriture une place importante à la soupe alors que les Romains ne la connaissaient pas. Au Moyen Age, le brouet est réalisé à partir de poulet ou de poisson.
Le brouet proposé est extrait du Liber de coquina: ayez des poulets coupés en morceaux; faites les revenir avec du lard et des oignons. Prenez un peu d’eau froide, puis les foies de volailles; broyez les avec marjolaine ,romarin, persil, safran; mettez le tout dans le bouillon de viande. Ajoutez les viandes et faites bouillir en y mêlant des épices: cannelle, clous de girofle, noix de muscade, gingembre. Ecrasez des œufs durs. Détrempez les tranches de pain avec le bouillon et servez .chaud. Des herbes aromatiques et des épices sont indispensables à la réalisation de ce mets. Le persil, la marjolaine, le romarin sont nécessaires. L’auteur rajoute à la recette du miel.
Volaille au gingembre: coupez la volaille en morceaux et mettez la à cuire dans de l’eau et un peu de vin ,puis faites-la frire dans la graisse. Faites tremper du pain dans le bouillon et prenez du gingembre avec du cumin délayés dans du verjus, broyez, mettez-les dans le bouillon de viande ou de volailles, colorez avec du safran ou des jaunes d’œufs hors du feu; passez le tout à l’étamine.
 Poule à la sauge: Coupez la volaille en morceaux et faites-les cuire dans de l’eau salée. Laissez refroidir; broyez du gingembre, de la fleur de cannelle, de la graine de paradis, du girofle, broyez bien mais ne passez pas à l étamine; écrasez du pain trempé dans du bouillon de poussin avec le plus de persil possible et de la sauge;
Morue en morceaux: La morue est au Moyen Âge un des poissons les plus consommés. Le terme  "morue" ne s’applique pas au poisson frais qui est le cabillaud. Deux épices sont utilisées: le gingembre et le safran. Le premier est une plante herbacée dont on consomme le rhizome pour ses qualités digestives; le second apparait comme l’épice la plus chère: car on emploie uniquement le stigmate.
Détaillez la morue en morceaux. Saupoudrez d’épices. Façonnez en galettes rondes. Faites les frire à la poêle et retournez les 2 fois. Faites filer les œufs sur celles-ci; servez lorsqu’ils sont cuits.
Pour 6 personnes: 800 g.de morue pochée au préalable, 6 œufs, 1 cuillerée de gingembre, 1dose de safran .
Poisson en gelée: le poisson de mer est choisi. Pour ce plat sont retenues les épices suivantes: gingembre, cannelle, graines de paradis, clous de girofle. Elles sont accompagnées d’herbes aromatiques: persil, sauge, oseille, menthe, hysope, marjolaine. L’ auteur cite aussi la salemonde et le coq , c’est -à-dire la menthe coq, au goût  plus amère que la menthe.
Pour commencer prendre :persil, sauge, benoîte et vinaigre. Au préalable, broyez la balsamite, l’oseille, la marjolaine, le gingembre, la cannelle, les clous de girofle, la  graine de paradis. Laissez infuser dans le vin et le vinaigre pendant une heure. Filtrer. Vous obtenez un jus vert. Faites pocher le poisson puis verser dessus le jus vert. Mettez au frais pendant 2 jours. Il  est utile de donner un tour de bouillon au jus.
Beignets au fromage : prenez des jaunes d’œufs  et de la fleur de sel, un peu de vin. Battez tout ensemble en y mettant du fromage coupé en lanières. Préparez une pâte à beignet avec lait, farine,un œuf,huile; versez y l’ensemble précédent..Laissez reposer Prenez une grande cuillère emplie de cette pâte que vous plongez dans l’huile frémissante. Décorer avec du persil coupé menu.
Pour 6 personnes: 100g de fromage, 125g de farine, 30cl de lait, 3c d’huile, sel, huile pour friture.
Beignets de rose : lavez les pétales, égouttez les, faites les infuser dans de l’eau de rose. Laisser une demi-heure; couper le beurre en petits morceaux; faites bouillir le lait, ajoutez beurre et sel; versez la farine en une fois; travailler hors du feu jusqu’à ce que la pâte soit lisse; séparez les blancs des jaunes; montez les blancs en neige Incorporez les jaunes un à un; puis les blancs. La pâte doit avoir l’aspect d’une crème. Ajoutez l’eau de rose. Laisser reposer 30 minutes. Prenez une cuillerée de pâte, enrobez deux ou trois pétales de rose et jetez l’ensemble dans l’huile de friture bouillante.
Composition: pour 24 beignets: 50 cl de lait, 3 cuillerées à soupe de sucre, 100 g de beurre, 250 g de farine, 4 œufs, 1 pincée de sel, 4 c.eau de rose, 4 roses, huile.



A la fin du Moyen-Age, les épices sont moins nombreuses: seules se maintiennent le clou de girofle, la noix de muscade, le poivre. Le sucre est rare et très cher; il sert comme thérapeutique. Pour les plats dans les logis nobles, il est mis sur les viandes et les poissons. La canne à sucre avait été introduite au IXème en Andalousie par les Arabes qui l’avaient découvert en Perse.

jeudi 16 mai 2019

Le baron de Girardot

 

 Les chroniques de l’ARF
L’ARF, Recherches, Sauvegarde, Patrimoine ferriérois, proposera régulièrement aux lecteurs du Ferriérois des articles sur les personnages qui ont marqué la vie du village et parfois, plus souvent qu’on ne le pense, la vie nationale, ainsi que sur des évènements heureux, dramatiques ou insolites qui ont jalonné la vie des habitants. Les lecteurs sont invités à réagir et à faire part des informations ou de la documentation dont ils disposeraient, précisant ou complétant le contenu de la chronique.





Auguste Théodore, Baron de Girardot

Officier de la légion d’honneur

Officier des palmes académiques

Commandeur de l’Ordre de la conception de Villaciosa (Portugal)


A l’heure de la réouverture du musée Girodet à Montargis, ces chroniques commencent par une évocation de son fondateur, le Baron de Girardot, grand ferriérois d’adoption et de cœur dont le souvenir marque encore le village, on disait la ville à l’époque, et sa sépulture le cimetière.
Auguste Théodore Girardot est né à Paris le 8 juin 1815, dix jours avant la bataille de Waterloo. Son père François Girardot, chirurgien des armées royales puis impériales, avait suivi toutes les campagnes militaires. Blessé pendant la campagne de France en 1814, il avait reçu de l’Empereur lui-même le titre de Baron sur le champ de bataille.
Son père ayant quitté la France pour la Pologne où il mourra en 1831, Auguste Théodore et sa sœur furent élevés seuls par leur mère. Après des études au lycée Louis le Grand, il devint avocat en 1836 et intégra l’administration à la préfecture de Bourges en 1839. Sa passion pour l’archéologie, et l’histoire patrimoniale éclata immédiatement et il développa une activité débordante pour la protection et la promotion des monuments et documents historiques de son département. Dès son arrivée à Bourges et dans chaque ville où il sera affecté, il se plongera dans des archives inexplorées pour en tirer tout ce qu’elles contenaient d’inconnu ou d’original. Plus d’une centaine d’écrits et de communications jalonneront sa carrière.
Il est nommé en mai 1852 sous-préfet de Montargis. Son activité dans les domaines scientifiques et artistiques reste inlassable. Il n’y resta que deux ans et demi pendant lesquels il eut notamment le temps de créer, avec son ami et futur cousin Edmond Michel, la Société d’Emulation de Montargis, et le musée Girodet dont il fut un des premiers donateurs. En effet mu par son amour de l’art et de l’archéologie, et très imprégné de l’esprit de son temps qui vit la naissance de la pratique des collections personnelles, le baron avait commencé à en constituer une qui sera particulièrement fournie et éclectique. Il profita en outre de sa position administrative pour faire croire aux services ministériels que le musée existait déjà et obtenir de l’Etat des collections supplémentaires. Mais il eut aussi le temps de découvrir et se laisser séduire par la ville de Ferrières et ses habitants. Il se lia d’amitié avec les principales familles ferriéroises, et notamment les époux Nicas, qui habitaient rue de la Pêcherie face au lavoir et dont la femme, Rose Arsène Petit, était issue à la fois des maîtres de poste de Fontenay et des maîtres tanneurs de Ferrieres. Rose Arsène Petit, qui mourut en 1886 à 95 ans, était certainement une des femmes les plus considérées de la société ferriéroise du 19ème siècle.
Il poursuivit sa carrière à Nantes, mais de là-bas resta en relation étroite avec le Gâtinais et Montargis, publiant notamment dans le bulletin de la Société archéologique du Gâtinais ses recherches et découvertes de silex taillés à Girolles, ou entretenant une correspondance suivie avec le baron de Triquetti. C’est pendant cette période que le ministère de l’intérieur lui contesta le port de la particule que son père avait dédaigné porter et qui ne figurait pas sur son acte de naissance ; mais il eut gain de cause par un décret impérial du 19 novembre 1859 qui lui reconnût le droit à cet usage.
A sa retraite en 1871, devenu veuf, il revint à Ferrières et épousa en 1875 la fille de Rose Arsène Nicas, Laure Charlotte. Il s’installa en 1879 place Terre Chaude dans la maison qui prendra le nom de Maison du Philosophe, et sa fille Marie Antoinette qui venait de se séparer de son mari Jules Esmoingt vint le rejoindre et s’installer place du Champ (au coin avec la rue des Fossés) où elle décèdera en 1899. La vie de retraité ferriérois du baron sera consacrée à la lecture, à la recherche de silex taillés et à l’étude des plantes.
Le Baron de Girardot, en famille en 1880

En haut, deuxième par la gauche
Accompagné de sa belle-mère  (90 ans, au centre), de sa femme, de sa fille, de sa petite fille, et d’autres membres de la famille.
Le 27 avril 1883, « surpris par la pluie, au milieu d’une promenade d’herborisation, il fut pris d’un refroidissement qui ne tarda pas à se changer en une congestion pulmonaire. Alité le 30, M. de Girardot rendait le dernier soupir le jeudi 3 mai »  (Edmond Michel). Sa femme, s’éteindra le 12 mars 1920, à son tour à 95 ans.
Le Baron et la Baronne de Girardot, la Baronne Esmoingt, Rose Arsène Petit reposent dans le carré A du vieux cimetière de Ferrières, non loin de tous les autres membres de cette grande lignée ferriéroise.


Gauche : Baron et Baronne de Girardot. Centre : Rose-Arsène Nicas. Droite : Baronne Esmoingt

Edmond Michel écrivit cet éloge ; « Doué d’une intelligence remarquable secondée par une instruction solide et très variée, homme de bien dans toute l’acception du terme, d’un courage à toute épreuve, d’une grande délicatesse et d’un conseil sur dans les relations privées, bon, serviable, humain, tel nous avons connu le Baron de Girardot ».
                                                                                                       Françoise souchet
                                                                                                       François Petit

Photos : Baron de Girardot par Charles Huette,1874,  musée Girodet, Montargis.
              Baron de Girardot en famille : archives privées.
 Sépultures : ARF
Sources : Familles de Ferrières, Archives municipales de Ferrières, A. Andruszkiewicz (Ecole du Louvre, 2014), J .Fr. Lemaire (Société française d’histoire de la médecine, 1979), Edm. Michel (Société historique et archéologique du Gâtinais,1883).
ARF : Patrimoineferrierois.com ;
assrech.ferrieres45@yahoo.fr

mercredi 1 mai 2019

STATUE DE SAINT ELOI ABBATIALE SAINT PIERRE ET SAINT PAUL FERRIERES-EN-GATINAIS (LOIRET)


STATUE DE SAINT ELOI





Considérée comme la statue de St Aldric, abbé de Ferrières au IXème siècle, cette œuvre peut évoquer un autre saint : Saint Eloi. Sculptée fin XVème début XVIème, sa restauration a permis de déceler deux fers à cheval à l’intérieur de la manche gauche (côté de la crosse).

Statue de St Eloi après restauration
 
Détail de la manche
 
 Traditionnellement des outils précis traduisent l’activité de ce saint patron : enclume, marteau, tenaille, fer à cheval. Il est représenté tantôt en artisan (ex. au musée de Toul), tantôt en évêque (ex. à Troyes). L’allure majestueuse de cet évêque est renforcée par la qualité de ses vêtements et leurs ornements : traces de grenade, de feuilles de vigne, motifs tissés dans les riches étoffes de cette époque. Le visage exprime l’attention, la douceur. Notons  le port des gants réservés aux évêques, la mitre précieuse qui conserve la trace de riches pierreries. Que tenait-il dans sa main droite cassée ; marteau ou geste de bénédiction ? Au bas de la chasuble, une grande fleur de lis apparaît, symbole du pouvoir royal. Cet élément signifie la reconnaissance des qualités d’un conseiller apprécié de deux rois.
Ces observations nous laissent à penser que ce travail a été commandé par Louis de Blanchefort, Abbé de Ferrières de 1465 à 1505. De plus cette représentation correspond à l’histoire de l’abbaye bénédictine et à la présence de forgerons et d’orfèvres à Ferrières. Selon Dom Morin , l’église paroissiale située hors les murs, portait à l’origine le nom de Saint Amand car celui-ci aurait guéri de la cécité un ermite. Dévastée par les guerres civiles, les forgerons la restaurent à condition qu’elle soit dédiée à Saint Eloi, ce que réalisa à nouveau Louis de Blanchefort, relevant le chœur et y ajoutant deux chapelles latérales. Desservie par quinze prêtres, cette église reçut des reliques de Saint Eloi. A cette occasion, la statue y fut sans doute déposée.
Pour mémoire, rappelons rapidement l’histoire de ce saint. Né vers 588 dans le Limousin, région riche en mines d’or, Eloi entre jeune dans un atelier monastique fournissant la monnaie royale. Il suit également les offices religieux. Très habile, il est présenté au trésorier du roi Clothaire II, le père de Dagobert. Pour le mettre à l’épreuve, de l’or lui est confié afin d’exécuter un trône royal, et il réussit à en fabriquer deux. Il est alors admis à la Cour. Plus tard, Dagobert, devenu roi en 629, fait d’Eloi son monétaire attaché au Palais. Il y continue le travail d’orfèvrerie tout en se livrant à la prière et à la lecture des textes sacrés. A la mort de Dagobert, son fils Clovis II le maintient à ce poste, puis en 640, il quitte la Cour et entre dans la cléricature. Un an plus tard, il est nommé évêque de Noyon, comprenant outre son diocèse, la Flandre et la région de Gand. Il voyage dans tout le royaume, se fatigue, et meurt en 660.    J. Bonnefoy- Mars 2013