lundi 15 juillet 2019

Se nourrir au Moyen Âge

Se nourrir au Moyen Âge



Le pain est à la base de l’alimentation. Le pain blanc est destiné aux classes les plus favorisées mais aussi aux chanoines et aux moines. Le four de Saint-Gall était réputé pour pouvoir contenir 1000 pains. Pour  beaucoup de paysans, des bouillies d’orge et d’avoine remplaçaient le pain. En cas de disette, le sarrasin et la farine de châtaignes étaient utilisés. Pour de rares desserts, étaient composés des crêpes, des tartes dites tartres, parfois des beignets ou des galettes.
Les gens riches mangeaient des produits de la chasse fortement épicés et accompagnés de condiments. Toutefois, il est possible de consommer de la viande fumée ou salée. Pour les jours maigres, sont servis des plats de poisson de mer (morue, hareng salé ou fumé) ou de rivière, d’étang, de vivier. Au moment des fêtes, les œufs, la volaille, sont présentés aux plus riches. A ce régime, ceux-ci prenaient la goutte. Les pauvres en étaient préservés. Si le pain manquait, ils devaient se contenter d’herbes,c’est-à-dire de légumes.
Les moines, grâce à leurs élevages pouvaient manger des produits laitiers, en particulier du fromage. fabriqué avec le lait de brebis ou de chèvres.
Parmi les légumes, il convient de distinguer ceux qui poussent dans les champs: fèves, lentilles, pois, pois chiches et ceux qui poussent dans les potagers: poireaux, ails , laitues, oignons, carottes dont les tiges sont bouillies et les racines  cuites. dans la cendre de la cheminée.
Des textes ont permis de retrouver d’anciennes recettes .
Le liber de coquina, rédigé en latin a été écrit vers 1300. Il est divisé en plusieurs chapitres: légumes, légumineuses, viandes, desserts, poissons et entremets. Il consacre une place importante aux  légumes consommés dans les milieux modestes alors que les seigneurs mangent des entremets. On y relève des recettes de pois, pois chiches, fèves, lentilles, fenouil.
Le viandier écrit en1330 par Guillaume Tirel dit Taillevent  est l’ouvrage le plus connu du Moyen Âge. Il a été rédigé pour Charles V. Plusieurs versions ont été données. L’auteur suit l’ordre d’un repas médiéval: potages, rôtis,entremets. Le terme « viandier » est employé dans un sens large: vivenda signifie aliments en général.
Le mesnagier de Paris rédigé entre 1392 et1394, d’inspiration italienne, reprenant des façons de la cuisine romaine, est un ouvrage didactique destiné à une jeune épouse. La troisième partie est consacrée aux problèmes domestiques relatifs aux achats concernant la cuisine ainsi qu’aux recettes culinaires. Celles-ci sont au nombre de 400; certaines reprennent des descriptions prises dans des ouvrages antérieurs. Elles s’adressent notamment aux membres de la bourgeoisie.
 Dans l’ensemble, une cuisine un peu acide est préférée à base de vin, vinaigre, verjus.., oseille  L’utilisation de plantes  aromatiques la caractérise. Les paysans les connaissent; les moines les cultivent dans les jardins de leurs monastères. Agrémentée par celles-ci, des épices en relèvent encore le goût.
D’après le liber de coquina, le fenouil et l’aneth sont choisis en raison de leur goût assez particulier, fort prisé au Moyen Âge. L’aneth, dans certaines régions, s’appelle fenouil bâtard. Il a des vertus médicinales et stomachiques professées par les médecins de Salerne:  « l’aneth, qu’avec l’anis, il ne faut pas confondre, dissipe les vents, les humeurs; même il a la vertu de fondre un gros ventre et d’ éloigner les mauvaises humeurs ».La marjolaine et le romarin sont des plantes méditerranéennes Il existe deux sortes de marjolaine: officinale et origan. La première s’accorde avec le romarin; la seconde a un goût plus prononcé .
Le cumin est une ombellifère cultivée au Moyen Âge dans tous les jardins; les Romains l’utilisaient à la place  du poivre car les graines séchées ont une odeur forte. La sauge, elle est considérée comme un remède miracle; son nom est dérivé du latin  « salvare » signifiant sauver. Les médecins de l’école de Salerne énoncent ses vertus; elle permet de raffermir la main tremblante, de conforter les nerfs, d’arrêter la fièvre; bouillie avec du miel , elle aide les pneumatiques.
Exemples de recettes :
Les soupes "suppa" au Moyen Âge sont d’épaisses tranches de pain sur lesquelles on verse du bouillon. Le mot a ensuite pris le sens de potage. Elles sont à la base des repas des gens de la terre . Ceux qui vivent en plaine mangent plus souvent à leur faim  que ceux de la montagne mais ceux-ci ont une nourriture mieux équilibrée grâce aux produits laitiers et aux fruits sauvages.
Dans la cuisine médiévale, où souvent les mets sont bouillis ou trempés, il convient d’en relever le goût. Pour ce faire, une plante, le sénevé, facilement cultivé, donc peu cher est utilisée. Ce condiment porte le nom de moût ardent  car il pique les papilles. En effet, la moutarde est composée de graines de sénevé broyées avec du vinaigre ou du moût de raisin.
 Charlemagne recommande de cultiver celle-ci dans le capitulare de villis vel curtis imperii, aujourd’hui conservé à la bibliothèque de Wolfenbüttel en Suisse. Les plantes énumérées sont au nombre de 94. Toutes les plantes ont à la fois des qualités médicinales et culinaires. On reconnait à la moutarde des vertus thérapeutiques: antiseptique, apéritive. A cette époque, dans les villes, les enfants munis de pots vont l’acheter chez les marchands de sauce qui la confectionnent. Dans les campagnes, elle est réalisée à la maison.
Soupe à la moutarde : recette avec du pain; c’est un plat et non un bouillon.
Mettez l’eau additionnée de vin dans une casserole. Laissez bouillir et faites pocher les œufs. Retirez- les, égouttez et effrangez- les. Faites réduire le liquide de moitié. Ajoutez l’estragon, le persil, l’ail, le tout finement haché. Ajoutez la moutarde. Salez, poivrez. Remuez bien. Grillez les tranches de pain. Servez les œufs dans les assiettes chaudes, nappez les de sauce et  disposer les tranches de pain autour.
Pour 4 personnes: 4 œufs, 4 tranches de pain, 20 cl d’eau, 20 cl de vin rouge, 2 cuillerées à soupe de moutarde, 1 cuillerée à café  d’estragon haché, 1 de persil haché, 1gousse d’ail, sel et poivre selon le goût.
Brouet provençal. A l’origine,c’est une sorte de bouillon. Le terme est dérivé de  « breu » signifiant bouillon chez les Germains qui accordent dans leur nourriture une place importante à la soupe alors que les Romains ne la connaissaient pas. Au Moyen Age, le brouet est réalisé à partir de poulet ou de poisson.
Le brouet proposé est extrait du Liber de coquina: ayez des poulets coupés en morceaux; faites les revenir avec du lard et des oignons. Prenez un peu d’eau froide, puis les foies de volailles; broyez les avec marjolaine ,romarin, persil, safran; mettez le tout dans le bouillon de viande. Ajoutez les viandes et faites bouillir en y mêlant des épices: cannelle, clous de girofle, noix de muscade, gingembre. Ecrasez des œufs durs. Détrempez les tranches de pain avec le bouillon et servez .chaud. Des herbes aromatiques et des épices sont indispensables à la réalisation de ce mets. Le persil, la marjolaine, le romarin sont nécessaires. L’auteur rajoute à la recette du miel.
Volaille au gingembre: coupez la volaille en morceaux et mettez la à cuire dans de l’eau et un peu de vin ,puis faites-la frire dans la graisse. Faites tremper du pain dans le bouillon et prenez du gingembre avec du cumin délayés dans du verjus, broyez, mettez-les dans le bouillon de viande ou de volailles, colorez avec du safran ou des jaunes d’œufs hors du feu; passez le tout à l’étamine.
 Poule à la sauge: Coupez la volaille en morceaux et faites-les cuire dans de l’eau salée. Laissez refroidir; broyez du gingembre, de la fleur de cannelle, de la graine de paradis, du girofle, broyez bien mais ne passez pas à l étamine; écrasez du pain trempé dans du bouillon de poussin avec le plus de persil possible et de la sauge;
Morue en morceaux: La morue est au Moyen Âge un des poissons les plus consommés. Le terme  "morue" ne s’applique pas au poisson frais qui est le cabillaud. Deux épices sont utilisées: le gingembre et le safran. Le premier est une plante herbacée dont on consomme le rhizome pour ses qualités digestives; le second apparait comme l’épice la plus chère: car on emploie uniquement le stigmate.
Détaillez la morue en morceaux. Saupoudrez d’épices. Façonnez en galettes rondes. Faites les frire à la poêle et retournez les 2 fois. Faites filer les œufs sur celles-ci; servez lorsqu’ils sont cuits.
Pour 6 personnes: 800 g.de morue pochée au préalable, 6 œufs, 1 cuillerée de gingembre, 1dose de safran .
Poisson en gelée: le poisson de mer est choisi. Pour ce plat sont retenues les épices suivantes: gingembre, cannelle, graines de paradis, clous de girofle. Elles sont accompagnées d’herbes aromatiques: persil, sauge, oseille, menthe, hysope, marjolaine. L’ auteur cite aussi la salemonde et le coq , c’est -à-dire la menthe coq, au goût  plus amère que la menthe.
Pour commencer prendre :persil, sauge, benoîte et vinaigre. Au préalable, broyez la balsamite, l’oseille, la marjolaine, le gingembre, la cannelle, les clous de girofle, la  graine de paradis. Laissez infuser dans le vin et le vinaigre pendant une heure. Filtrer. Vous obtenez un jus vert. Faites pocher le poisson puis verser dessus le jus vert. Mettez au frais pendant 2 jours. Il  est utile de donner un tour de bouillon au jus.
Beignets au fromage : prenez des jaunes d’œufs  et de la fleur de sel, un peu de vin. Battez tout ensemble en y mettant du fromage coupé en lanières. Préparez une pâte à beignet avec lait, farine,un œuf,huile; versez y l’ensemble précédent..Laissez reposer Prenez une grande cuillère emplie de cette pâte que vous plongez dans l’huile frémissante. Décorer avec du persil coupé menu.
Pour 6 personnes: 100g de fromage, 125g de farine, 30cl de lait, 3c d’huile, sel, huile pour friture.
Beignets de rose : lavez les pétales, égouttez les, faites les infuser dans de l’eau de rose. Laisser une demi-heure; couper le beurre en petits morceaux; faites bouillir le lait, ajoutez beurre et sel; versez la farine en une fois; travailler hors du feu jusqu’à ce que la pâte soit lisse; séparez les blancs des jaunes; montez les blancs en neige Incorporez les jaunes un à un; puis les blancs. La pâte doit avoir l’aspect d’une crème. Ajoutez l’eau de rose. Laisser reposer 30 minutes. Prenez une cuillerée de pâte, enrobez deux ou trois pétales de rose et jetez l’ensemble dans l’huile de friture bouillante.
Composition: pour 24 beignets: 50 cl de lait, 3 cuillerées à soupe de sucre, 100 g de beurre, 250 g de farine, 4 œufs, 1 pincée de sel, 4 c.eau de rose, 4 roses, huile.



A la fin du Moyen-Age, les épices sont moins nombreuses: seules se maintiennent le clou de girofle, la noix de muscade, le poivre. Le sucre est rare et très cher; il sert comme thérapeutique. Pour les plats dans les logis nobles, il est mis sur les viandes et les poissons. La canne à sucre avait été introduite au IXème en Andalousie par les Arabes qui l’avaient découvert en Perse.

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